vendredi 7 octobre 2016

ARCHIVE DU BLOG MARATHONIEN67 OCTOBRE 2016

 Semi-marathon des Courses de Sélestat

À FORCE DE FAIRE DES BORNES, ON FINIT PAR ÊTRE BORNÉ 
 
Born to run, jeune et déterminé/ à force d'enchaîner les bornes, on finit par être borné/ on dépasse les bornes tel des forcenés/ on se borne à courir sur des routes goudronnées/ Quand l'moral est miné, y'a toujours quelque part/ une parcelle bitumée prête à nous recevoir/ et l'espoir renaît à chaque nouveau départ/ dans un p'tit coin paumé où loge dame victoire

Semi-marathon des Courses de Sélestat: À FORCE DE FAIRE DES BORNES, ON FINIT PAR ÊTRE BORNÉ ! Le départ du semi-marathon vient tout juste d'être donné et le podium se dessine déjà. Je mène la danse juste devant Kader Mahmoudi le futur vainqueur de l'épreuve avec le vosgien Anthony Léon à mes côtés. (crédit photo: merci Jacky !)


Dimanche 02 octobre. Avec ma séniorita, nous quittons notre habitat/ À quatre semaines du marathon de Lausanne, je pars fouler l'asphalte à Sélestat/ La commune ne se trouvant point dans le Minnesota, nul besoin de mettre des mines à des Ford Fiesta/ C'est avec une paire de baskets aux pieds qu'on va jouer les Ricardo Zonta. En prépa marathon, chaque jour est synonyme de mission. Et ma mission du jour consiste à parcourir la distance du semi-marathon (21,1km) à une allure comprise entre 3'15 et 3'20 au km. En principe cela ne devrait pas me causer trop de soucis. Pour moi, courir sur ces bases là, c'est « presque » devenu la routine. En comptant les fois ou je l'ai fait en course, à l'entrainement, ou en officiant en tant que lièvre lors de marathons, je crois que j'ai dû courir une bonne quarantaine de semi-marathons entre 1h06' et 1h10' (et encore, je n'inclus pas les temps de passage marathon).
 
Lorsque nous entrons dans Sélestat, nous ne trouvons aucun panneau de signalisation. C'est un motard de l'organisation qui nous guide et nous conseille un endroit où garer notre véhicule. De là, nous poursuivons la route à pied, et un petit kilomètre plus tard, à 8h20, nous arrivons devant la porte du Complexe Sportif Adrien Zeller. Rapidement, je récupère mon sésame pour l'effort et nous sortons pour assister au départ du 10km qui cette année sera lancé à 8h30. Cette plage horaire est loin d'avoir fait l'unanimité et pour cause: pas évident de s'époumoner à une heure si matinale. Sur « 10 bornes », le cardio grimpe super haut. Il ne vaut mieux pas dormir au coup de pétard.
 
Le 10km des courses de Sélestat, je l'ai couru à plusieurs reprises pour chasser la perf. Normal, le parcours de l'épreuve traîne depuis longtemps la réputation d'être le plus rapide de la région. J'ai eu la joie de monter sur le podium deux fois, avec une seconde place obtenue en 2006 et un 3e accessit acquis en 2011. Ici, j'ai couru plusieurs fois sous les 31'00. Parallèlement, j'ai découvert le parcours du semi-marathon l'an dernier (7e en 1h10mn05) et je l'ai trouvé roulant. Roulant, oui, mais... Cette année, le circuit du semi (comme celui du 10km) a subit quelques modifications. Du coup, pour cette édition, on nous l'annonce plus corsé avec l'ajout de nombreux virages et quelques passages de ponts bien cassants. La reconnaissance du parcours, la semaine dernière, a, comme j'ai pu le lire dans les DNA, laissé les participants dubitatifs.
 
Vers 9h30, pendant que je m'échauffe sur un bout de trottoir, je rencontre Pierre (Joncheray). Tandis qu'il me salut, je lui lance un « bravo ». Une petite demi-heure avant, il a signé une belle performance sur 10Km (3e en 30'30). Tout le microcosme du running alsacien est ravi de le revoir courir à ce niveau. Par contre, ses adversaires se réjouissent beaucoup moins. Tandis que je termine de me préparer, aux abords de la ligne de départ, je retrouve Carole en pleine discussion avec Caroline, une dentiste coaché par mes soins, qui vient de participer à sa toute première course ce matin (le 10km) et qui est heureuse comme tout. Nous échangeons quelques paroles avec Cathy et Pierre, un couple de sportifs que je coache depuis quelques mois et qui va courir le semi-marathon. Et il y a aussi Julien, un jeune expert-comptable passé de 50 à 41mn sur 10km en très peu de temps, et qui a encore une belle marge de progression devant lui. Tous sont venus courir ici sur mes conseils. Car même avec ses circuits modifiés, Sélestat reste Sélestat. Beaucoup de records personnels sont tombés dans cette mythique arène pédestre.

Cette année, les managers n'ont pas inscrits de coureurs africains. Du coup, les régionaux pourront jouer leur carte à fond et faire le spectacle sans être relégués au second rang. À vrai dire, ce n'est pas moi qui vais m'en plaindre. Les coureurs kényans, je les aime bien, mais au-delà du plan purement sportif, je garde un mauvais souvenir de la précédente édition. Voir de mes yeux un manager véreux empocher toutes les primes remportées par les athlètes africains ne m'avait pas plu. J'en ai d'ailleurs fait part sur mon blog dans un article intitulé: «Un dimanche matin avec ma mobylette» Pour tenter de contrer cette pratique malhonnête, cette année les modalités de distribution des prix ont changés. Ainsi les récompenses ne seront plus remises au moment du podium mais seront envoyées par "La Poste" à l'adresse des coureurs. De cette façon, les managers douteux ne pourront plus se graisser la patte sur le dos des athlètes, tel des négriers des temps modernes. 
 
Semi-marathon des Courses de Sélestat: À FORCE DE FAIRE DES BORNES, ON FINIT PAR ÊTRE BORNÉ ! Semi-marathon des Courses de Sélestat: À FORCE DE FAIRE DES BORNES, ON FINIT PAR ÊTRE BORNÉ !

Les Courses de Sélestat 2016 interdites aux extraterrestres ? Ou juste aux managers véreux qui les exploitent sans état-d'âmes? 

À 10h15, le départ est donné. Après deux tentatives infructueuses le coup de pistolet retentit enfin et les semi-marathoniens sont lâchés dans la ville.  Afin d'éviter les bousculades, je choisis de partir vite et me retrouve en tête de la course sur les premiers hectomètres.


Le peloton de tête comprend une demi-douzaine d'athlètes. À mes cotés, on retrouve Kader Mahmoudi vainqueur, entre autre, des 10km de Saverne il y a deux semaines, qui participe ce matin à son 2e semi, on trouve aussi Bastien Cligny et Jean Mathis qui m'ont tous deux devancé au sprint récemment, le premier l'hiver dernier lors de la Corrida de Neuf- Brisach (6,6km) et le second en juillet lors des 10km de la Robertsau. Le vosgien Anthony Léon, qui avait fini une place devant moi, en août lors des foulées de Longemer, a fait le déplacement depuis la Lorraine pour chercher la perf, le semi-marathon de Nancy ayant été annulé pour des raisons de sécurité. Enfin, comme un vosgien peut en cacher un autre, Ludovic Laurent que j'avais croisé lors du semi-marathon de Thaon-les vosges en juin dernier, est lui aussi de la fête. 

Après deux kilomètres parcourus au petit trot, Anthony Léon secoue le cocotier déclenchant les foudres de Kader Mahmoudi. Voilà les deux hommes partis pour un mano-à-mano, puisque personne d'autre ne répond à l'attaque du coureur vosgien. 

Ayant choisi de rester en retrait avec Bastien Cligny dans ma foulée, je m'emmêle un peu les pinceaux avec les bornes kilométriques du 10km et celles du semi-marathon. Je vois d'abord un 1er panneau marquant le 3e km avant de voir, une poignée de secondes plus tard, un second panneau affichant le même chiffre 3. Au second panneau, à ma montre, je suis en plus de 10mn. Après un rapide calcul, je comprends que je suis loin des 3'15, 3'20 au kilo soit l'allure que j'ai prévu de suivre au départ. 
 
Je comprendrais un peu plus tard qu'en fait le 1er panneau était le bon et que j'allais suffisamment vite. En attendant, dans le doute, je décide de partir à la poursuite des deux fuyards, qui s'expliquent une vingtaine de mètres devant moi. Pour cela, je durcis un peu le train.

Pendant ce temps là, en tête de cortège, Kader et Anthony se rendent coup pour coup. Lequel des deux fera plier l'autre ? Qui sortira vainqueur de ce duel matinal ? J'assiste en spectateur privilégié à la grosse bagarre pour la gagne - même s'il est un peu tôt pour parler de victoire puisque qu'aucun de ces deux athlètes n'est à l'abri d'une défaillance ou d'un retour de l'arrière.  

Tandis que je mène la chasse, caressant le goudron avec affection, je garde Bastien Cligny à l'œil. C'est le seul à avoir suivi, tout à l'heure, lorsque je me suis lancé à la poursuite des deux fuyards. Depuis, il a perdu quelques mètres mais je ne dois pas le laisser revenir dans ma roue.

Au 5e kilomètre, la baston tourne à l'avantage de Kader et je vois Anthony Léon perdre mètre après mètre. À présent, voilà le vosgien pris en sandwich (ou en croque-monsieur), il a son bourreau devant le nez et un croque-mort dans le dos. 

Sur les sept premiers kilomètres du circuit, couru intra-muros, j'ai un peu l'impression de participer à un Grand Prix Moto avec Valentino Rossi. Les virages serrés, très nombreux, nous tombent dessus sans arrêt. Pas évidente à gérer cette partie là. À force de devoir relancer sans arrêt, on finit par perdre de l'énergie et un temps précieux. Toutefois l'avantage de tous ces virages, c'est qu'ils cassent un peu la monotonie des longues lignes droites interminables que l'on retrouve souvent dans les courses de fond.

Aux abords du 9e kilomètre, à force de persévérance, je parviens à rejoindre Anthony, et, là, plutôt que de poursuivre la chasse, je décide de faire un bout de chemin avec lui. Sur le coup, tactiquement, ça me parait être le bon choix. Car malgré son début de course offensif, le vosgien ne m'a pas l'air trop entamé, il a même l'air d'avoir encore du répondant. Autant profiter de quelques relais avant de remettre les voiles. Surtout que depuis que nous avons quitté la ville, un vent désagréable se fait sentir. Je suis content de pouvoir m'abriter un peu même si je fais facilement deux têtes de plus que mon camarade. Une fois réunis dans l'effort, on s'encourage sportivement, on s'entraide mutuellement. Une belle attitude.

Notre duo atteint la borne du 10e km au bout de 32'30'' de course, comptant alors une trentaine de secondes de retard sur l'homme de tête. Celui-ci ayant brièvement stoppé son effort à une table de ravitaillement, intérieurement, je m'interroge: « Kader connaitrait-il une petite défaillance physique ? » « Sa faible expérience sur la distance lui jouerait-elle des tours ? » 

Entre le 13e et le 14e km, nous arrivons sur un sentier parsemé de gravillons. Sur cette partie là, je sens que le rythme faiblit d'un ton. Je décide donc d'appuyer sur le champignon pour tenter de me rapprocher de l'homme de tête que j'ai en point de mire depuis le départ. Ce faisant, je parviens à prendre le meilleur sur mon camarade vosgien alors que ce n'était pas le but premier. Anthony décroche légèrement et je me retrouve seul à pagayer contre le vent.

Au 15e km, Jean-Marc Paulen, le commissaire de course à moto, m'annonce avec un retard de 40''. Par la suite l'écart creusé par l'homme de tête ne grandit pas d'avantage mais celui-ci gérant parfaitement son avance, je ne parviens pas à revenir sur ses talons dans le final.

La chasse est close mais aujourd'hui je ne rentre pas bredouille à la maison. Dans mon sillage, je traîne la bête des Vosges et une meute de loups. Une meute de jeunes loups pas encore très aguerris mais leurs dents finiront bien par pousser avec le temps !  
 
J'achève ma course bon deuxième avec le sentiment du devoir accompli. Je suis tout à fait à ma place dans cette course. Peut-être qu'en réagissant plus tôt, j'aurais d'avantage pesé sur son déroulement mais j'ai fait le choix de temporiser, entre le 9e et le 14e km. Ce choix, je l'assume entièrement. À Sélestat, mon idée première était de réaliser une séance rythmée sans finir dans un piteux état. Sans surprise, les bornes avalées à l'entrainement ont fait leur boulot, le moteur est « bridé » mais au final je dresse un bon constat. Aujourd'hui, je pense avoir réalisé une sortie correcte. Sur un parcours casse-patte, je signe un 1h09'34'' qui me convient très bien car je n'espérais pas mieux (ce chrono équivaut à une moyenne de 3'17 au kilo). Sans les multiples relances et les passages de ponts, et avec une meilleure gestion de course, j'aurais sans doute encore grappillé quelques secondes mais l'essentiel est d'avoir fait du bon boulot dans l'optique du marathon de Lausanne. Pas de regrets, la préparation suit son cours. Pas de regrets, non, juste un p'tit creux. Ça tombe bien puisqu'un camembert bien moelleux et une baguette tradition m'attendent dans le coffre de la caisse. Il manque plus que le pinard !  

Semi-marathon des Courses de Sélestat: À FORCE DE FAIRE DES BORNES, ON FINIT PAR ÊTRE BORNÉ ! Semi-marathon des Courses de Sélestat: À FORCE DE FAIRE DES BORNES, ON FINIT PAR ÊTRE BORNÉ ! Semi-marathon des Courses de Sélestat: À FORCE DE FAIRE DES BORNES, ON FINIT PAR ÊTRE BORNÉ !

 

Après l'arrivée, nous retrouvons avec joie Martin Anckenmann, Karim Foulouh et Luigi Antonelli, des habitués du macadam alsacien. Karim a signé quelques belles performances à Selestat. 

Dans la zone d'arrivée, je retrouve avec bonheur ma señorita de Sélestat et notre petite mascotte. Les journalistes sont tous regroupés autour de Kader qui leur distille ses impressions à chaud. Je le félicite avec une poignée de main avant d'en faire de même avec Anthony qui a fini bon 3e en glissant sous la barre des 1h10''. Bastien (Cligny) et Jean (Mathis) franchissent tour à tour la ligne et me tendent la main sportivement. Petite tape cordiale en attendant la prochaine bataille. Quelques mètres plus loin, j'échange mes impressions avec Karim (Foulouh) plusieurs fois vainqueur du 10km avec des temps canons, tandis que Martin (Anckenmann) nous raconte ses belles vacances en Corse, Jacky (Loos) le coach de mon club passe, gentiment, me voir pour me féliciter. J'rigole un bon coup avec Luigi (Antonelli) alias « le kenyan blanc » qui a toujours une histoire drôle à raconter. Et je file me plier au fameux rituel de la remise au calme. Une facette de l'entraînement trop souvent négligée par les coureurs.
 
Avant de grimper sur le podium, je fonce casser la croûte à la bagnole avec ma moitié sous le bras. Elle doit prendre des forces la petite car cet après-midi il y a une sortie longue qui l'attend. J'ai prévu de l'accompagner à vélo avec Haloa (notre chihuahua adore vadrouiller à bicyclette). Ma championne, je lui voue toujours une admiration sans borne... Ouais bon... disons plutôt une admiration à 150 bornes (par semaine). Pourquoi ? Parce que j'me demande comment elle arrive encore à me supporter. 

Faut dire qu'à force d'enchaîner les bornes, on finit par être borné !


 
Semi-marathon des Courses de Sélestat: À FORCE DE FAIRE DES BORNES, ON FINIT PAR ÊTRE BORNÉ ! Semi-marathon des Courses de Sélestat: À FORCE DE FAIRE DES BORNES, ON FINIT PAR ÊTRE BORNÉ !

La marathon de Lausanne approche. Plus que quatre semaines avant le top départ. Après le semi-marathon du matin, l'après-midi, nous avions rendez-vous dans la forêt du Neuhof. Dans ce havre de paix, j'ai revêtu le costume de coach pour suivre la sortie longue de Carole et Haloa s'est occupé du ravitaillement. 


Résultats semi-marathon Courses de Sélestat - 02/10/16
SELESTAT - ALS - 067 - Label National


1 1h08'52'' MAHMOUDI Abdelkader Running Team Schweighouse
2 1h09'34'' BAALA Samir S/l Vendenheim                                                         
3 1h09'50'' LEON Anthony S/l Athle Vosges                                                        
4 1h11'03'' CLIGNY Bastien Ac Centre Alsace                                                    
5 1h11'53'' MATHIS Jean A.s.l. La Robertsau La Robertsau


 
Pour l'anecdote, je termine à la place 2e place du semi-marathon de Sélestat tout juste 10 ans après avoir fini second du 10 km des Courses de Sélestat-édition 2006. Lors de cette édition là, alors que je caracolais en tête de la course, j'avais été rejoins puis déposé à moins de 2km de l'arrivée par Jeffrey Eggleston, un jeune coureur américain prometteur venu faire ses études en Alsace. Un athlète qui a depuis cette escapade alsacienne parcouru la distance du marathon en 2h10'52'' !  Voici son profil de coureur : http://www.all-athletics.com/node/83552